Histoire
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Le couvent franciscain de Saorge est à l’image de son territoire: une subtile alliance de baroque et de sobriété, le cadre grandiose de la sérénité. Plongeons dans son histoire !
C’est au début du XVIIe siècle que la commune de Saorge fit appel à la communauté franciscaine, afin de venir en aide à la population de la vallée de la Roya, territoire stratégique reliant la côte méditerranéenne aux montagnes du Piémont, alors durement touché par la peste.
La décision d’installer la communauté franciscaine fut prise en 1633, et en 1639 la première croix est plantée par le père Jean-François Blancardi, faisant ainsi écho à la Chapelle Saint Bernard, déjà présente sur le site.
La dédicace du couvent à Notre-Dame des Miracles évoque à la fois le contexte de l’installation et le défi que constitue l’implantation sur ce site qui surplombe magnifiquement le village de Saorge et les gorges de la vallée de la Bendola !
L’architecte demeure inconnu, mais le plan de l’édifice et ses proportions sont parfaitement conformes aux principes de construction définis par l’ordre Franciscain à cette époque. Le chantier avance lentement, au gré des aumônes des habitants.
Entre 1640 et 1648, la commune offre des terrains puis en 1665, elle fournit du bois de la forêt du Cairos, l’une des plus importantes du comté, pour élever l’église. En 1674, la population participe à l’aménagement du chemin menant au couvent. Mais en cette période troublée, la misère des habitants rend la quête insuffisante et en 1679 le Père Jean-Baptiste sollicite une aumône au conseil de village, pour assurer au moins l’alimentation des frères.
Finalement, en 1681 le chœur de l’église et la toiture du dortoir des frères sont achevés. En 1684, le conseil accorde aux frères le captage de la source de la Fontanella sous réserve qu’ils bâtissent un abreuvoir pour les bêtes des particuliers et autorisent aux Saorgiens l’usage de la citerne du cloître. Celui-ci est en effet équipé d’un dispositif destiné à recueillir les eaux de pluie.
En 1695, on dénombre 7 prêtres et 5 laïcs à Saorge, soit 12 religieux, effectif maintenu au siècle suivant. La population du village est alors bien supérieure en nombre à ce qu’elle est aujourd’hui : on compte environ 3000 habitants à la fin du XVIIIème siècle tandis qu’ils ne sont guère que 400 aujourd’hui !
Au rez-de-chaussée, le couvent est constitué d’une église et d’un cloître ouvrant sur des cellules et communiquant avec le jardin, la cuisine et le réfectoire. Derrière la sacristie, des espaces techniques regroupaient un cellier, une buanderie avec lavoir et des espaces de stockage.
À l’étage se trouvent l’infirmerie, les cellules des frères et le chauffoir. Le monument est en effet très peu chauffé et, lors des hivers rigoureux, la communauté trouvait le réconfort dans cette pièce, dans la cuisine et, exceptionnellement dans le réfectoire quand un brasero y était installé.
Sous le monument, côté sud, une bergerie est construite à même le rocher brut. Elle accueillait les troupeaux de brebis des bergers de passage, offrant à ceux-ci un gîte pour la nuit et les protégeant des vols de bétail.
Au XVIIe siècle, le décor est sobrement constitué d’un badigeon blanc, selon la tradition franciscaine. Dans l’église, le grand retable en noyer qui sépare le chœur de la nef est alors magnifiquement mis en valeur, orné de sculptures et enrichi de touches de couleur. Les dorures restent rares.
À l’intérieur du couvent, les murs sont peints de nombreuses devises et emblèmes : il s’agit d’exercices de méditation destinés à détourner les frères franciscains de l’oisiveté et de les rapprocher de Dieu.
Au XVIIIe siècle dans la mouvance de la Contre-Réforme catholique, le couvent se pare de nouveaux ornements dans un style original, à mi-chemin entre la sobriété de l’ordre franciscain, et les fastes du baroque.
L’église reçoit alors des médaillons en stuc accueillant des portraits de personnalités franciscaines tandis que la galerie du cloître présente, en 25 fresques, le cycle de la vie de Saint-François. Les murs de la cour sont progressivement ornés de trompe-l’œil, et de l’une des plus remarquables séries de cadrans solaires.
Chassés par les soldats français de Bonaparte et Masséna, les frères franciscains quittent le couvent en 1794. Après avoir été occupé par les troupes, il est affecté à l’hospice communal puis rendu aux Franciscains en 1824. Une communauté s’y réinstalle jusqu’en 1903, date de promulgation de la loi sur les congrégations.
Le monument connaît alors des affectations diverses. Il est occupé par les soldats italiens et allemands durant la Seconde guerre mondiale. L’État français rachète le couvent à la commune en 1967, y réalise des travaux, et permet aux Franciscains d’y revenir en 1969 jusqu’au départ du dernier frère en 1988.
Aujourd’hui, le monument est ouvert au public et accueille des auteurs et artistes en résidence d’écriture et de création, venus chercher le calme et l'inspiration. Des rencontres sont régulièrement organisées avec le public.
Le monastère de Saorge a bénéficié d’une importante campagne de restauration qui a permis à une partie des fresques du cloître et à l’ensemble des décors de l'Eglise Notre-Dame des Miracles de retrouver toute leur splendeur.
Toutes ces merveilles sont à découvrir en visite libre ou commentée.